Titre

LPrise en charge des péritonites communautaires

D’APRES la Conférence de consensus DE LA SFAR (Juin 2000)

Auteur

Pr Claude Martin

MARSEILLE

Epidémiologie bactérienne des péritonites :

Les espèces isolées au cours des péritonites communautaires proviennent de la flore digestive commensale qui colonise le liquide péritonéal.  Les prélèvements des liquides péritonéaux sont le plus souvent polymicrobiens : environ 2 à 4 espèces différentes par prélèvement.

Les micro-organismes les plus fréquemment retrouvés sont : parmi les bactéries aérobies ou aérobies tolérantes,  Escherichia coli ( 60 à 70 %) et Enterococcus spp (10 à 30 %) ; parmi les bactéries anaérobies strictes, celles appartenant au genre Bacteroides avec une nette prédominance de l’espèce Bacteroides fragilis présente dans 20 à 45 % des cultures et au genre  Clostridium  (5 à 20 %).

Les autres bactéries sont représentées par des bacilles à Gram négatif des genres Klebsiella (10 à 20 %), Enterobacter et Proteus (5 à 10 %), Pseudomonas  aeruginosa (10 à 20 %), des cocci à Gram positif appartenant aux genres Staphylococcus, Streptococcus et Peptostreptococcus. Candida albicans  est retrouvé avec une fréquence de 3 à 5 %..

Les bactéries aérobies, en particulier E. coli, agissent en synergie avec les anaérobies stricts dans la pathogénie des péritonites.

Les péritonites d’origine sus-mésocolique ont une flore différente des péritonites d’origine sous-mésocolique.

·        La prise en charge chirurgicale des péritonites communautaires représente l’essentiel de la thérapeutique. Elle doit être aussi précoce que possible et assurer la suppression de la cause de l’inoculum. La préparation préopératoire doit permettre de corriger les principales perturbations humorales (dyskaliémies en particulier) et hémodynamiques (remplissage vasculaire, amines vaso-actives). Quoi qu’il en soit, l’intervention chirurgicale ne sera pas différée de plus de quelques heures, même et surtout si l’état de choc persiste malgré une réanimation intensive.

L’abord chirurgical fait appel, en fonction de la pathologie, du terrain et de l’expérience de l’opérateur à une laparotomie ou à une coelioscopie. Aucune étude prospective contrôlée de bon niveau n’a démontré la supériorité de l’une ou l’autre de ces deux techniques dans les péritonites communautaires.

L’abord coelioscopique premier des péritonites communautaires trouve ses indications essentielles dans les perforations ulcéreuses duodénales et les péritonites appendiculaires. L’abord par laparotomie doit être large et médian chez l’adulte, des voies d’abord électives étant le plus souvent utilisées chez l’enfant. Après prélèvements bactériologiques systématiques, l’exploration de la cavité péritonéale doit être complète.

L’existence d’une perforation digestive, d’un sphacèle fait habituellement recommander une exérèse d’emblée du foyer causal, même si certaines lésions justifient parfois une attitude plus conservatrice.

·        L'antibiothérapie probabiliste est mise en œuvre dès le diagnostic établi. Elle doitsystématiquement prendre en compte les entérobactéries, particulièrement E. coli, et les bactéries anaérobies, particulièrement B. fragilis. Ces bactéries sont les principales responsables du pronostic vital immédiat et des abcès résiduels. L’entérocoque est isolé dans 10 à 30 % des péritonites communautaires. Bien que son rôle dans les complications infectieuses post-opératoires soit reconnu, aucun consensus ne peut être obtenu sur l'obligation de le prendre en compte dans une antibiothérapie initiale.

L’isolement de Pseudomonas aeruginosa est rapporté dans plusieurs études sur les péritonites communautaires. Sa prise en compte ne pourra être discutée que dans des situations particulières.

Compte tenu d’un certain nombre d’éléments : distribution de la résistance en France des espèces bactériennes habituellement rencontrées dans les péritonites communautaires ; risque d'émergence de souches résistantes aux fluoroquinolones utilisées en monothérapie ; absence d'information directe sur la sensibilité des bactéries isolées dans les péritonites ; caractère fragmentaire des études, les schémas possibles :

ü     Amoxicilline / acide clavulanique + gentamicine ou tobramycine

ü     Ticarcilline / acide clavulanique + gentamicine ou tobramycine Cefoxitine Cefotaxime ou ceftriaxone + imidazolé

ü     Aminoside + imidazolé

ü     Céfépime + imidazolé

ü     Pipéracilline / tazocilline à réserver aux formes graves

ü     Imipénem à réserver aux péritonites nosocomiales.

·        Dans une situation où le pronostic vital est fortement engagé, les principes de l'antibiothérapie sont l'optimisation du traitement en terme de bactéricidie et la conception d'une antibiothérapie dont le spectre ne comporte aucune impasse vis-à-vis des hypothèses microbiologiques. L'intérêt d'appliquer une telle attitude aux péritonites communautaires n'a pas reçu de confirmation clinique. La littérature n'apporte pas clairement de réponses en faveur d'une antibiothérapie probabiliste renforcée ; cependant, il paraît raisonnable de l'utiliser dans les situations où le pronostic vital est fortement engagé. Appliqués aux péritonites communautaires, les schémas "Amoxicilline / acide clavulanique + gentamicine", "Ticarcilline / acide clavulanique + gentamicine", "Cefoxitine", "Cefotaxime ou ceftriaxone + imidazolé" et "Gentamicine + imidazolé" (à réserver aux sujets allergiques aux bêta-lactamines), ne doivent être considérés comme insuffisants que dans les situations cliniques avec pronostic vital fortement engagé. Dans ces situations, le risque d'une pathologie due à P. aeruginosa, Enterobacter, autres entérobactéries résistantes ou bacilles à gram négatif non fermentants, doit être pris en compte malgré sa rareté, en particulier chez les patients ayant un risque d'écologie bactérienne digestive modifiée (vie en institution, antibiothérapie préalable.  Le bien-fondé du maintien de l'ensemble de ces schémas doit être réévalué en fonction de l'évolution clinique et après résultats des prélèvements et identifications bactériennes.

Référence : www.sfar.org